Sabrina Montiel-Soto

Une histoire de fantôme pour adulte

Telle Alice franchissant les portes d’ivoire de sa fantaisie, Sabrina Montiel-Soto nous invite à plonger au cœur d’un monde poétique et enchanté n’ayant pour devise que cette seule idée : « Le rêve est une seconde vie ». Jouant avec les objets de notre quotidien comme d’autres jouent avec les images de leur enfance, les œuvres de cette artiste Vénézuélienne ne sont pas de simple ready-made, mais de véritables contes métaphysiques appelant celui qui les contemple à plonger en lui-même pour en (re)découvrir le sens.

Une histoire de fantôme pour adulte

« Il s’agit de pointer la fracture, l’élément symptomatique, disruptif, voir incongru, qui transforme l’image organisée en un champ de tensions. »
Joseph L. Koerner

Ce n’est peut-être pas un hasard si Sabrina Montiel-Soto est d’abord et avant tout une artiste cinéaste, c’est-à-dire, une artiste ayant du temps et de la narration, une appréhension personnelle et complexe. Mêlant le réel à l’imaginaire, ses œuvres semblent toujours traversées de réminiscences. Que ce soit dans ses collages, ses films où ses petits décors, un même sens de l’anachronisme et du montage unifie ses créations. Jouant tantôt avec le point de vue du spectateur (disproportion, hors-champ), tantôt avec le contenu de l’œuvre elle-même (juxtaposition de plusieurs univers, détournement d’objet du quotidien ou de tableaux déjà existants), son travail redonne à la célèbre formule d’Horace - Ut pictura poesis - sa pleine actualité.

Le soldat inconnu - Sabrina Montiel-SotoMemorias de un invierno frio - Sabrina Montiel-Soto

Dans son installation Memorias de un invierno frio (Mémoire d’un hiver froid) par exemple, se joue comme une partie d’échec avec l’image que nous nous faisons d’ordinaire de notre passé. A l’image photographique – support supposé parfait de la mémoire – Sabrina Montiel-Soto ajoute un corrélat plastique : une petite collection d’éprouvette contenant chacune un fragment de la photographie complète. Mais à cette première mise en évidence de la structure fragmentée de notre mémoire, il faut encore ajouter un autre élément dynamique : la présence d'un petit personnage n’appartenant ni vraiment au monde de l’image (de la photographie), ni à celui des objets (des éprouvettes), mais à cet entre-deux duplice – l’imagination – qui relie l’image supposée réelle de la photographie aux délires les plus étranges de notre fantaisie.

Poursuivant ainsi d’une manière plastique les réflexions menées par l’historien d’art Abby Warburg sur la temporalité fragmentée des images , les œuvres de Sabrina Montiel-Soto nous obligent à penser autrement notre rapport au visible ; et plus surement encore, à laisser les discordances qui le traversent redevenir le centre énergétique d’une histoire sans parole. En guise de conclusion, citons cette formule de Walter Benjamin : « L’image est ce en quoi l’Autrefois rencontre le Maintenant dans un éclair, pour former une constellation, un cristal de temps.»

Frédéric-Charles Baitinger

Artiste

Sabrina Montiel-Soto est une artiste vénézuelienne qui vit et travaille à Paris.

www.calvacreation.mine.nu
Lieu d'exposition

Galerie Hardcore Art Contemporary Space

Soul without face

du 5 Août 2010 au 7 Mars 2010

3326 N. Miami Ave, Miami, FL

www.hardcoreartmiami.com